PARIS, 3 septembre (Xinhua) -- Le défilé militaire que la Chine a organisé ce mercredi pour le 80e anniversaire de la victoire de la Seconde Guerre mondiale met en valeur l'émergence d'une multipolarité dans un monde instable de plus en plus menacé par la loi du plus fort, estiment des observateurs français.
"Ce défilé est bien plus qu'une simple exhibition de force. C'est un acte de mémoire collective et de souveraineté retrouvée (qui) renforce la cohésion nationale et la fierté d'un pays qui, après un siècle d'humiliations, s'est relevé pour reprendre sa place légitime sur la scène mondiale", juge Aymeric Monville, directeur des éditions Delga.
Pour Jean-Pierre Page, rédacteur en chef de la revue La Pensée libre, le défilé militaire a illustré la détermination de la Chine de défendre sa souveraineté. "Cette souveraineté s'exerce sur toute la Chine, c'est-à-dire à l'ensemble de ses provinces et régions sans exception. C'est pourquoi la Chine ne saurait être amputée d'une partie de son territoire."
Lors du défilé tenu ce mercredi sur la place Tian'anmen dans la capitale chinoise, de nouveaux équipements ont été dévoilés.
"La modernisation en Chine touche tous les secteurs, par conséquent le militaire. (...) Rien ne saurait remplacer sa volonté de voir progresser la coopération internationale, le droit au développement et l'amitié entre les peuples", affirme M. Page.
"Il faut interpréter cette présentation à travers le prisme de la doctrine de défense nationale de la Chine, qui est fondamentalement défensive. Le dévoilement de nouveaux équipements n'est pas une provocation, mais une démonstration de transparence et de responsabilité", estime M. Monville, saluant "des avancées technologiques et de l'innovation dont fait preuve la Chine, fruit de son développement scientifique et industriel souverain".
"La Chine, en modernisant son armée, ne fait que suivre le principe universel de tout Etat souverain : assurer sa propre défense pour éviter le conflit. C'est l'application concrète de l'adage 'Si tu veux la paix, prépare la guerre'", affirme-t-il.
Pour M. Monville, le défilé militaire, commémorant "le sacrifice immense du peuple chinois pour la victoire contre le fascisme", a aussi été "un appel à une mémoire historique plus inclusive et juste", car "la Seconde Guerre mondiale n'a pas été uniquement un théâtre européen. Le front oriental a été tout aussi décisif".
"Le rôle de la Chine fut absolument crucial et tragiquement sous-estimé", déplore M. Monville. D'après l'expert, en Europe, la méconnaissance de la contribution chinoise pourrait s'expliquer par, entre autres, "un eurocentrisme historique persistant", et un biais idéologique qui est aussi un héritage de la guerre froide.
"La Chine a joué un rôle capital dans la défaite du fascisme. (...) Rien ne pourra effacer les massacres perpétrés par le fascisme japonais, en particulier à Nanjing en 1937, mais aussi ce que fut la résistance héroïque de la Chine jusqu'à sa victoire", souligne M. Page, dénonçant le refus du Japon d'"admettre la bestialité et l'inhumanité qui fut la sienne".
Le Japon a officiellement capitulé le 2 septembre 1945 en signant l'Acte de capitulation. La Chine a désigné le 3 septembre comme Journée de la Victoire.
"Le refus d'assumer pleinement son histoire est une faute morale et politique aux conséquences profondément dangereuses. Sur le plan régional, ce déni perpétue un profond sentiment de méfiance et d'insécurité parmi les voisins qui ont souffert de l'expansionnisme japonais. (...) Sur le plan universel, cela représente un risque de banalisation des crimes de guerre et des atrocités commises", analyse M. Monville.
Pour les deux observateurs, le défilé militaire a aussi été une démonstration de l'engagement chinois à une gouvernance mondiale plus juste et plus équitable.
"Cet événement, tenu quelques jours après un sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) met en valeur l'émergence d'une multipolarité qui annonce une nouvelle architecture mondiale. La Chine joue sur ce plan un rôle décisif aux côtés de ses partenaires stratégiques", indique M. Page.
"La défense de l'ordre international par la Chine signifie la défense du multilatéralisme et du système onusien contre les dérives unilatérales et les logiques de blocs. Dans un monde en proie à l'instabilité, la Chine offre une voie alternative : celle d'un partenariat gagnant-gagnant, du dialogue et d'un développement partagé. C'est une vision profondément moderne et responsable de la gouvernance mondiale", souligne M. Monville. Fin
