BRUXELLES, 5 octobre (Xinhua) -- Des pays européens et des dirigeants de l'industrie automobile ont critiqué cette semaine la décision de l'Union européenne (UE) d'imposer des droits de douane punitifs sur les véhicules électriques chinois, avertissant que cette mesure pourrait avoir un effet boomerang et, à son tour, nuire à la compétitivité de l'UE.
Bien que la Commission européenne ait dit avoir obtenu le soutien nécessaire des Etats membres, 12 d'entre eux se sont abstenus et cinq ont voté contre. Dans le même temps, la Commission a également appelé les deux parties à explorer une solution alternative.
OPPOSITION D'ETATS MEMBRES
C'est l'Allemagne qui s'est opposée le plus bruyamment à l'instauration de ces droits de douane, disant y voir "une erreur". "Nous devons parler franchement et négocier avec la Chine, mais les guerres commerciales ne font que des perdants", a averti jeudi sur le réseau social X le ministre allemand des Finances, Christian Lindner, au lendemain de l'appel du chancelier Olaf Scholz à poursuivre les négociations avec la Chine.
Faisant écho à ces préoccupations, la Hongrie a voté contre l'imposition des droits de douane. "Ce qu'ils nous font faire en ce moment, ou ce que l'UE veut faire, c'est une Guerre froide économique", a déclaré vendredi à la radio publique MR le Premier ministre hongrois Viktor Orban.
Matjaz Han, ministre slovène de l'Economie, du Tourisme et des Sports, a également exprimé son opposition, mettant en garde contre un "prix trop élevé" pour l'Europe. Il a plutôt plaidé en faveur d'une coopération économique et commerciale plus concrète entre l'UE et la Chine.
La Finlande s'est abstenue lors du vote de vendredi. Jukka Kuurma, haut fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères, a déclaré aux médias locaux qu'il n'y avait pas suffisamment de preuves des dommages causés à l'UE par le "soi-disant" soutien de l'Etat chinois à l'industrie des véhicules électriques. "Nous ne sommes pas tout à fait convaincus que les droits d'importation seraient dans l'intérêt général de l'Union", a-t-il dit.
L'Espagne fait également partie des pays qui se sont abstenus lors du vote. Le ministre de l'Economie, du Commerce et des Entreprises, Carlos Cuerpo, a déclaré que la décision de s'abstenir visait à maintenir les négociations avec la Chine ouvertes et à trouver une solution négociée.
TOLLE DANS L'INDUSTRIE
L'annonce de la Commission a provoqué une levée de boucliers dans l'industrie automobile européenne. Pour elle, cette mesure pourrait nuire à la compétitivité des constructeurs automobiles continentaux et porter atteinte aux intérêts des consommateurs.
Dans une déclaration publiée vendredi, Hildegard Müller, présidente de l'Association allemande de l'industrie automobile, a décrit cette décision comme un nouveau pas en arrière de la coopération mondiale.
Le géant allemand de l'automobile Volkswagen a également publié un communiqué appelant à une solution négociée. Selon lui, les droits de douane envisagés ne constituent pas la bonne approche et n'amélioreront pas la compétitivité de l'industrie automobile européenne.
"Le vote d'aujourd'hui est un signal fatal pour l'industrie automobile européenne", a déclaré Oliver Zipse, PDG de BMW, aux médias locaux. "Une solution rapide doit être trouvée entre la Commission européenne et la Chine afin d'éviter un conflit commercial qui ne fera que des perdants".
Mercedes s'est également inquiétée des effets négatifs sur l'industrie. "Nous sommes convaincus que les tarifs douaniers punitifs détériorent la compétitivité d'une industrie sur le long terme", a dit une porte-parole du constructeur allemand citée par l'agence de presse allemande DPA.
En plus de nuire à la compétitivité, des connaisseurs de ce secteur pensent également que les droits de douane pourraient nuire aux intérêts des consommateurs européens.
"En fin de compte, les droits de douane n'aideront personne, ils ne feront que nuire aux consommateurs européens, qui seront perdants, ainsi qu'aux pays eux-mêmes", selon Hrvoje Prpic, président de l'Association croate des conducteurs de véhicules électriques.
DES APPELS A LA NEGOCIATION
A la suite de l'annonce de l'UE, la Chambre de commerce chinoise auprès de l'UE (CCCEU) a exprimé vendredi sa profonde déception et son vif mécontentement face à l'adoption de ces mesures commerciales protectionnistes.
"Nous encourageons vivement l'UE à aborder les mesures finales avec prudence, à retarder la mise en œuvre de ces droits de douane et à donner la priorité à la résolution des différends et des tensions commerciales par le biais de consultations et d'un dialogue", a dit le CCCEU dans un communiqué.
Dans une interview à Xinhua, Holger Görg, directeur du Centre de Kiel pour la mondialisation, a dit espérer que les deux parties garderont la tête froide et resteront à la table des négociations, car les négociations entre la Chine et l'UE sont toujours en cours.
Dans une déclaration commune, le plus grand syndicat d'Allemagne, IG Metall, et les comités d'entreprise des principaux constructeurs automobiles allemands ont proposé un régime de soutien et de commerce alternatif axé sur le CO2 qui s'appliquerait de la même manière à tous les constructeurs.
"Compte tenu des perspectives d'avenir de centaines de milliers d'employés des constructeurs automobiles allemands et de leurs fournisseurs, nous affirmons sans équivoque que les droits de douane ne sont pas la bonne approche", a estimé le syndicat. Fin